mardi 1 mars 2011

Le défi du livre dans l’Atlantique

Livre n°27 : Atlantic par Simon Winchester, 2010.

La bibliothèque a récemment acquis ce livre, donc il était sur la table des nouveautés devant la porte, et a attiré mon attention. J’aime bien Winchester ; ça fait des années que j’ai son Krakatoa en audio et je l’écoute sur la route. C’est chouette parce qu’il sait plein de trucs qui n’ont apparemment rien en commun sauf le fait que moi je ne le savais pas. D’un autre côté, il a beaucoup tendance à anthropomorphiser, à parler de lui-même, et à donner son opinion sur tout. Bon, c’est son livre, il peut bien avoir une opinion, mais quand c’est genre « j’adore l’ancien nom de telle chose, dommage qu’on l’ait changé », bon, c’est pas très intéressant.

Pour en revenir à Atlantic, c’est donc une histoire de l’océan atlantique. (Si !) On croirait que ça va être passionnant. Moi, en tout cas, je le croyais.

Et bien ça ne l’est pas. D’abord, il s’intéresse surtout à l’histoire humaine de l’Atlantique, alors que moi, je m’intéresse plus à l’histoire naturelle.

Deuxièmement, au lieu de suivre une progression linéaire, il a tout groupé par thème : l’exploration, le commerce, la guerre, etc. Bon... C’est un choix comme un autre, mais qui me plaît plutôt moins qu’un autre. Ça ne donne pas le sens d’avoir compris l’histoire, justement.

Troisièmement, rien n’est approfondi. Dans Krakatoa, il parle tant de l’histoire coloniale de l’Indonésie qu’à la fin on a l’impression d’y connaître quelque chose. C’est même tellement passionnant que ça me donne envie d’écrire aussi un livre dessus, alors que je ne connais rien à l’Indonésie. Atlantic ne te donne pas l’impression d’avoir vraiment appris quelque chose ; c’est plutôt une accumulation d’aperçus très limités d’un grand nombre de choses. Donc je sais maintenant qu’il y a de grandes colonies d’oiseaux migrateurs dans les Iles Féroés, que l’océan est plein de cyanobactéries, et que sur un vol transatlantique, il y a environ une heure où l’avion n’a aucune possibilité de détournement s’il y a un problème. Bon... j’aurais pu trouver tout ça sur Wikipedia.

Quatrièmement, cette fois-ci il parle vraiment trop de lui-même. « Une fois j’ai traversé l’Atlantique en bateau. Plus tard j’ai eu un coloc qui est devenu diplomate. J’ai lu un livre sur le MV Dunedin Star et je suis allé trouver l’épave. » Bon... T’as 500 pages pour nous raconter toute l’histoire de l’Atlantique et tu nous parles de ta vie ? T’as-tu entendu parler d’un gars qui s’appelait Narcisse, des fois ?

Cinquièmement, le réchauffement global. Pfffffffff... Faiche, le réchauffement global. Ça m’intéresse même pas. En plus c’est hypocrite comme tout, son truc, parce que dans Krakatoa il nous explique comment après une grosse éruption, la poussière volcanique suspendue dans l’atmosphère cause un refroidissement global qui met des dizaines, voire des centaines d’années à se corriger. Krakatoa, nous dit-il, aura refroidi la planète pour à peu près 150 ans, c’est-à-dire qu’on devrait encore remarquer du réchauffement post-Krakatoa jusqu’en 2035, au moins. Et Tambora, en 1815, la plus grande éruption des 10.000 dernières années, dix fois plus grosse que Krakatoa, a causé une année sans été en 1816 et la dernière famine du monde industrialisé. Or tout ça, avec les volcans, c’est logique, et c’est facile à prouver (pas pour moi, évidemment, mais pour les paléo-climatologues). Alors que les émissions de carbone qui réchauffent la planète, ça, il y a quand même beaucoup de climatologues qui n’y croient pas. Donc pour en revenir une fois de plus au bouquin en question, dans Atlantic, il nous parle beaucoup du réchauffement global à cause des échappements des avions, des bateaux, blah blah blah... et pas un seul mot sur Krakatoa, ou Tambora, ou les autres. Entre 1815 et 1915, cinq volcans (Tambora, Krakatoa, Tarawera, Santa Maria et Novarupta) ont produit entre eux plus de 1200 km³ de cendre et poussières. De 1916 à maintenant, le seul volcan très explosif (6 sur l’échelle volcanique) a été Pinatubo, qui n’a fait que 10 km³. Donc évidemment, on remarque un réchauffement global sur les deux siècles depuis Tambora. Et ça je le sais, justement, parce que je me suis penchée sur la question après avoir lu Krakatoa. Donc de nous expliquer ça dans un livre et de blâmer les pots d’échappements dans le livre suivant, ça ne me paraît pas très honnête.

Et dernièrement, le livre n’a pas été bien corrigé. Il y manque des mots, ou il y a un mot de trop, ou il répète ce qu’il nous a déjà dit au chapitre précédent. Ça donne l’impression qu’il a fait confiance à son traitement de texte pour l’orthographe et ne s’est pas donné la peine de se relire ou de faire éditer le manuscrit.

Donc, dans l’ensemble, je ne recommande pas ce livre. Krakatoa est bien mieux écrit et plus intéressant.

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