dimanche 27 février 2011

Commentaire d’un lecteur : « t’es pas fine »

Ben tiens, j’espère bien que non. Faut être vraiment crétin pour être « fin ».

Pour les français non-canadiens, je t’explique : « fin » ça veut dire « gentil », ou en anglais, « nice ». Alors on pourrait croire que c’est bien, d’être gentil, mais on aurait tort. Il n’y a rien de plus vicieux que les gens fins.

Voyez-vous, au Canada, il y a beaucoup de gens qui trouvent que ça devrait être un crime de dire que quelqu’un a tort. Il y en a même qui croient que ça l’est déjà. Il est donc pratiquement interdit de dire aux enfants qu’ils ont tort, ainsi qu’aux femmes, aux gays, aux fonctionnaires, aux aborigènes, et aux hommes à la bite trop petite.

L’ennui c’est qu’il est impossible d’apprendre à moins d’admettre qu’on a tort, donc les gosses n’apprennent pas à bien faire les choses, puis ils grandissent, ils deviennent travailleurs, et ils font mal leur ouvrage. Si tu es censé gérer un de ces losers, et que tu lui dis qu’il a mal fait quelque chose, il fait une crise de nerfs et c’est toi qui es dans le trouble. Une fois j’ai dû former une fille comme ça. Comme elle ne faisait pas ce que je lui disais, elle se trompait tout le temps. Bon. Son travail n’étant pas difficile, ça me prenait vingt secondes de corriger ses erreurs. Big deal. Mais elle faisait sa crise de nerf avant de se faire engueuler, pour détourner l’engueulade, donc après les vingt secondes pour corriger son erreur, et bien que je ne l’ai jamais engueulée, ça prenait vingt minutes de mon temps de la faire s’arrêter de gémir et se remettre au travail. Heureusement elle a fini par comprendre que la manutention c’est un peu trop élevé pour elle et elle a trouvé une vocation plus adaptée à ses facultés mentales et à son amour-propre fragile : elle est maintenant enseignante.

Bon. Donc déjà, grâce aux gens « fins » à qui on ne peut jamais rien apprendre, le Canada part vachement en couille. Mais le pire c’est que non seulement on ne peut pas leur dire qu’ils ont tort, ils voudraient t’empêcher de dire que quiconque pourrait avoir tort. Et comme de toute évidence les gens ont souvent tort, surtout ceux qui ne peuvent pas supporter de se faire dire qu’ils ont tort, il va de soi que les gens qui s’acharnent à dire que personne n’a tort sont soit idiots, menteurs, ou poltrons, ou encore les trois. Et c’est ça qu’on appelle les gens « fins ».

Comme les gens « fins » n’acceptent pas l’idée même d’avoir tort, il sont évidemment incapable de construire un argumentaire. Ils ne connaissent donc qu’une méthode de débat : l’attaque ad hominem. Etant en outre, comme je le disais, les êtres les plus vicieux et sournois du monde, ils ne se contentent pas de t’insulter, ils cherchent également à te harceler par n’importe quel moyen qui n’aura pas de conséquences pour eux. Et le plus marrant, c’est qu’ils ne se rendent même pas compte que de t’agonir d’insultes pour prouver que toi t’es pas fin et eux le sont, ça n’a aucun sens.

Bon.

L’ennui, c’est que je m’en fous. D’avoir tort, c’est pas un grand drame, de se le faire dire encore moins. Donc, je le dis. Parfois poliment, parfois moins, selon l’humeur et le sujet. Du coup les gens fins s’acharnent à me nuire pour prouver à quel point eux sont gentils. Par contre personne ne me présente une opinion contraire à la mienne, de façon rationnelle et civilisée, donc il faut croire que j’ai raison.

Alors à toi, le lecteur ténois qui t’apprête à faire une crise de nerfs parce que je suis pas fine, je te suggère d’aller le faire sur ton propre blog, avec tes lecteurs fins qui seront d’accord avec toi. Parce qu’ici, les jérémiades des gens fins, ça n’intéresse personne.

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