vendredi 31 décembre 2010

Incroyable mais vrai

Le 23 décembre, j’avais reçu une notification qu’une lettre recommandée m’attendait au bureau de postes. Tout de suite je me dis « ça pour sûr c’est la hyène des Droits du Travail qui me jette mon dossier à la tête et me dit d’aller me faire voir. »

Mais entre le poignet cassé et les nombreux jours de congés observés pour les fêtes, je n’ai pu aller chercher ma lettre qu’aujourd’hui.

Bin j’avais 100% raison. Au lieu de faire tourner mon dossier comme je lui ai demandé, fermement mais civilement, elle l’a pris elle-même et a rejeté ma plainte. Pas de signature sur les documents, alors que c’est la procédure normale de ce bureau, mais elle a signé la lettre, selon laquelle puisqu’on me payait pour la demi-heure du déjeuner, j’ai (selon elle) été payée $2500 de trop. Et de me citer un article du code qui n’a absolument rien à voir avec la question.

Incroyable.

D’être payé pour le déjeuner, en effet, ce n’est pas requis par le Code du Travail, mais quand un employeur s’y engage et en fait de même pour tous ses employés, ça s’appelle un « avantage acquis ». Et même dans une juridiction aussi arriérée que les TéNOs, les employés ont quand même droit à leurs avantages acquis, selon l’article 4 dudit Code du Travail qui dit noir sur blanc que le code est un standard minimum et n’empêche en rien les employés de recevoir plus de bénéfices de leur employeur ; il les empêche uniquement d’en recevoir moins que le minimum prévu par la loi.

Donc oui, j’ai été payée 30 minutes par jour pour le déjeuner. Moi et tous les autres gars. Et alors ? Ça n’a rien à voir avec la question, qui est que les heures supplémentaires n’ont pas été calculées selon le minimum prévu par la loi, et que donc, on me doit encore la différence.

C’est tellement incroyable d’être aussi bête que je n’y crois pas pour une seconde. Pas que je doute que cette femme soit assez stupide, vu comment elle gère son service, mais je crois que dans ce cas-ci, c’est de la méchanceté pure et simple, et une arrogance monstrueuse, car pour se permettre de me traiter comme ça, ça veut dire qu’elle ne pense pas avoir de conséquences. Bien sûr je peux et je vais faire appel, et d’ailleurs grâce à certaines données que je n’avais pas mais qui étaient inclues dans son rapport, j’ai pu réviser ma demande de $1600 à $2100. Mais de toute évidence, elle se sent sûre de ne pas être disciplinée même si je gagne l’appel. Je dis « si » car je n’ai pas complètement confiance à la procédure d’appel puisque ce sont les mêmes fonctionnaires fourbes qui vont la traiter. Une main lave l’autre… Mais il faut bien en passer par là avant de faire un procès. D’une façon ou d’une autre j’aurai bien mon argent un jour, car ce n’est pas une question d’opinion, c’est l’application mathématique du Code du Travail. Il n’y a rien à disputer. J’aimerais quand-même que ça ne dure pas des années.

Enfin puisque c’est ainsi, je pense leur intenter un procès après avoir reçu mes sous. Cet argent vient de mon ancien patron, pas du gouvernement, donc ce n’est pas du tout la même chose, et je peux gagner ma plainte puis faire un procès au gouvernement. Gagnerais-je ? On ne sait jamais, mais il doit bien y avoir un juge qui soit d’accord avec moi qu’un gouvernement n’a aucun droit de se comporter comme ça.

Et puis pendant que j’y suis, je mijote un projet de recours collectif. Je crois qu’en France vous n’avez pas ça, mais ici ça se fait beaucoup quand il y a plusieurs parties lésées de la même façon par le même défendant. C’est facile, on crée une « classe » et on met des annonces dans les journaux genre « tous ceux qui ont eu tel problème avec telle entité, appelez-nous sans frais. » L’avocat est payé un pourcentage de ce qu’il gagne, et tout le monde est gagnant. C’est ce qu’on fait pour les Enron et autres.

Alors mon recours collectif, ça porterait sur quoi, à votre avis ? Hé bien ça serait sur leur bête idée d’envoyer tous les apprentis à Fort Smith. On est tous lésés d’une façon ou d’une autre. Moi, par exemple, je vais chercher du travail hors du territoire. Ça me détruit mes relations personnelles, ça me coûte cher, le Chinook me donne la migraine, mais qu’y faire ? Je ne vais quand même pas me laisser gâcher ma formation. D’autres gars ont carrément abandonné leur formation plutôt que de faire comme moi. Pour ceux qui y vont, c’est à peine mieux. Un camarade qui avait bien plus d’heures que moi n’a pas pu échapper à Fort Smith, il commence donc sa première période le 28 mars, alors que moi avec bien moins d’heures, j’ai déjà fini. Avec un peu de chance je pourrais même encore commencer ma deuxième période en avril. Et tant qu’il ne va pas en formation, le patron ne lui donne pas son augmentation obligatoire de passage d’année. Mais il n’a pas le choix, puisqu’à Fort Smith il n’y a qu’une session de première de charpenterie par an, alors que dans l’Alberta chacune des grandes écoles en fait six par an. Et pour tous ceux qui se laissent envoyer à Fort Smith, on sait qu’ils reçoivent une formation de mauvaise qualité. Donc tous les apprentis y perdent… et c’est comme ça qu’un « classe » se crée.

Il faudrait juste deux choses : un, que j’aie le temps de m’en occuper, et deux, trouver un avocat qui veuille s’en charger.

Cela dit, je vais me coucher. Après tout, demain est un autre jour. (Ah, tiens, non, il est une heure du mat’, demain est donc aujourd’hui. Enfin je me comprends.)

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