dimanche 21 novembre 2010

Et si on se moquait du gouvernement des TéNOs, un peu?

Ça faisait un moment que je ne vous avais pas parlé de notre gouvernement ; je suis sûre que ça vous manque.

Au dernier épisode, notre gouvernement avait essayé de nous convaincre qu’on manque de travailleurs. Enfin qu’on va manquer de travailleurs. Dans dix ans. Donc il faut venir des gars du nord de l’Ontario, une région qui géographiquement, n’existe pas. Je vous le prouve :


Comme je disais, le nord de l’Ontario, y a pas. Il y a la baie d’Hudson, qui appartient à Nunavut.

Bon. Alors comme on ne croyait pas ces histoires vaseuses que nous raconte le gouvernement, ils ont fini par s’expliquer un peu plus. C’est pas les travailleurs qui vont manquer dans dix ans, c’est les employés de la fonction publique, parce que vu leur âge, il y en a beaucoup qui vont prendre leur retraite dans les dix prochaines années.

Ah, d’accord. Ça, ça paraît vraisemblable, encore qu’on s’en foute assez. Ce que ça n’explique pas c’est pourquoi on voudrait faire venir des travailleurs maintenant pour des postes qui vont exister, probablement, dans dix ans. On dirait plutôt une campagne pour faire venir des chômeurs à long terme. Et ça ne serait pas forcément une mauvaise idée, car ça pourrait faire baisser l’inflation, mais à mon avis, ils le font surtout pour avoir une base de chômeurs à embaucher plus tard, comme ça ils pourront dire « regardez, on embauche localement ! » Bande de tares.

Ce qui est surtout énervant, maintenant qu’on comprend pourquoi ils nous ont collé leur stupide « viens faire ta marque NWT », c’est que leur méthode exclut presque automatiquement les Ténois du recrutement pour les postes très surpayés de la fonction publique. En général, ça se fait comme ceci : disons que le gérant de l’aéroport de X prend sa retraite. Un mois ou deux avant, le gouvernement passe une annonce disant qu’on recherche « un gérant d’aéroport avec quinze ans d’expérience. » Evidemment, on n’en trouve pas dans le territoire. Ici on a autant de gérants d’aéroport qu’on a d’aéroports ; il n’y en a pas en réserve qui attendent depuis des années que quelqu’un parte à la retraite. Donc, automatiquement, le gouvernement va chercher hors du territoire, au lieu de former quelqu’un de chez nous. Et le gars avec quinze ans d’expérience, évidemment, il est lui-même presque bon pour la retraite, alors ça permet de nous dire que dans dix ans, on va manquer de gérants d’aéroports.

Ce système est d’autant plus stupide qu’on n’a vraiment pas besoin de quinze ans d’expérience pour gérer nos aéroports. Et puis comme me disait un ex-employeur, quinze ans d’expérience, ça peut être quinze ans d’expérience, ou un an d’expérience quinze fois. Et dans le domaine de la gestion d’aéroports, ou de routes, ou d’assistance publique, c’est plutôt quinze fois un an d’expérience. D’ailleurs au bout d’un moment, plus d’expérience, ça devient nuisible, car les circonstances changent alors que les gestionnaires se figent et ne font que répéter ce qu’ils faisaient il y a quinze ans. Donc au lieu de faire venir un gérant d’aéroport d’ailleurs, il vaudrait bien mieux créer un poste d’assistant au gérant qui va prendre sa retraite, pendant un an ou deux, pour qu’il forme un jeune du coin qui pourra le remplacer. Autre avantage de cette méthode : un gars qui a deux ans d’expérience comme sous-fifre coûte bien moins cher qu’un gars qui vient d’ailleurs avec quinze ans d’expérience de fifre.

Bon. Donc d’abord, la méthode de recrutement du gouvernement des TéNOs empêche les Ténois d’obtenir les bons postes bien surpayés. Deuxièmement, ça fait baisser les salaires pour les autres, comme ceci. Le nouveau gérant de l’aéroport de X arrive avec sa femme et ses trois ados. Lui est payé, disons, $150,000. Je ne sais pas le nombre exact, mais on sait que c’est beaucoup. La femme et les trois ados n’ont besoin de rien, mais ils se trouvent chacun une job inutile, genre caissier, pour se faire de l’argent de poche. Et comme ils n’en ont pas besoin pour vivre, ils acceptent un salaire qui ne permettrait pas de vivre à moins d’avoir un homme qui gagne $150,000. Donc pour les gens du coin, genre les mères seules qui n’ont pas fait d’études, ça fait quatre jobs en moins dans la communauté, pis ça fait baisser les salaires pour toutes les autres jobs de caissier.

En anglais, on appelle ça des carpetbaggers ; en français ça ne se traduit pas. Le carpetbagger d’origine, c’était quelqu’un qui venait du Nord (des Etats-Unis) s’installer dans le Sud après la guerre de Sécession pour profiter de la situation pour s’enrichir. Comme la plupart étaient d’anciens soldats ou des gens qui n’avaient pas trouvé à faire fortune dans le Nord, ils arrivaient avec juste ce qu’ils pouvaient transporter dans un carpetbag, une forme de bagage durable et pas chère faite de tapis recyclés.

Chez nous on a une deuxième forme de carpetbagging, c’est les gars de l’est qui prennent des emplois saisonniers, en général pour des compagnies de BTP. On les appelle des canards, parce qu’ils arrivent pour la saison et dès que le temps change, ils s’envolent de nouveau pour de plus vertes pâtures. Et l’ennui avec eux, c’est que dans l’est, le coût de la vie, et donc les salaires, sont bien moins élevés. Par exemple à Terre-Neuve, un apprenti charpentier gagne un tiers de moins que chez nous, et ça c’est déjà un tiers de moins que dans l’Alberta. Donc le canard de base ne s’attend pas à être payé autant que nous autres. Deuxièmement, il vit dans un camp de travail pour la saison, donc il ne paye pas pour son loyer, son chauffage, son épicerie, rien. Et il fait beaucoup d’heures sups. A la fin de la saison, il repart chez lui, et il est riche. Mais en attendant, ça permet à la compagnie de baisser les salaires aussi pour les gars qui vivent ici à plein temps, et qui donc paient nos coûts exorbitants pour le loyer, le chauffage et l’épicerie.

Donc, on a ces carpetbaggers qui prennent les bons emplois à des prix exorbitants, et les mauvais emplois à des prix encore plus bas qu’avant. Et en plus, ils nous créent de l’inflation. Un employé du gouvernement m’a assuré que nous sommes en période de déflation à cause de La Crise, mais n’empêche que le prix du lait à Hay River a augmenté de 40% en moins de trois ans, alors, cause toujours, tu m’intéresses.

Le carpetbagger crée de l’inflation car il peut se permettre de payer les prix ridicules du coin, et aussi parce que les entrepreneurs ne veulent pas être moins riche qu’un bête fonctionnaire qui ne fait rien de la journée. (Et c’est bien ce qu’ils font, en gros. Ils travaillent de 9h00 à 16h00 et si tu leur demandes quoi que ce soit, ils se mettent vachement en rogne et ils te font attendre deux semaines. Heureusement qu’on les paye $90,000 par an plus leur billets d’avion non-imposable vers le sud deux fois par an.) Et comme il n’y a pas de compétition, l’entrepreneur peut se permettre de charger n’importe quoi. Si tu te plains du prix, on te dit que c’est normal, c’est le coût du transport. Sauf que là y a un truc marrant, parce que les choses coutent moins cher à Yellowknife qu’à Hay River. Pourtant Yellowknife c’est 450 km plus loin de l’Alberta, et on veut nous faire croire que de traverser sur le bac ça coûte des masses d’argent, c’est pour ça qu’il faut un pont pour faire baisser le coût de la vie à Yellowknife, etc. Bon… Alors si c’est si cher de faire venir les choses à Yellowknife, pourquoi les prix sont-ils moins chers qu’à Hay River ?

Simplement, parce que Yellowknife, c’est cinq fois plus grand, donc il y a de la compétition. A Hay River, tu veux t’acheter une lampe ou un sèche-cheveux, t’auras déjà du mal à en trouver un qui convienne, alors bonne chance pour le trouver moins cher ailleurs en ville. D’ailleurs si un gars monte ses prix, les autres vont le faire aussi, parce que ça prouve bien qu’ils n’arnaquaient pas assez leur monde.

Heureusement, maintenant que le commerce sur internet s’est étendu à presque tout, on n’a plus besoin d’acheter à Hay River. Si je veux un sèche-cheveux, je peux trouver un magasin en ligne qui ne me chargera pas pour le transport, donc je paye un tiers de moins que chez moi. Il y a des âmes nobles qui continuent à acheter localement pour « soutenir l’économie », mais moi je m’en fous, j’ai travaillé sur les maisons des commerçants qui nous arnaquent comme ça et je ne pense pas qu’ils aient besoin de mon soutien. Au contraire.

Alors plus les prix montent, moins on achète, et plus les prix montent. Parce que le commerçant Ténois n’est pas seulement avide, il est généralement ignare, donc il ne sait pas que pour faire monter la demande, il faut baisser les prix. Et comme on a ces femmes et gosses de riches qui n’ont rien de mieux à faire de leur argent, il y a toujours quelqu’un pour payer leurs prix ridicules.

Et non seulement ces employés de la fonction publique surpayés prennent nos jobs, font monter les prix, et font baisser les salaires, mais en plus, ils nous coûtent très cher en impôts. Au recensement de 2006, il y avait 41 464 Ténois, et pour l’exercise fiscal 2008-2009, le gouvernement territorial a eu un budget de 1,326 milliards de dollars. Soit 32 000 dollars par homme, femme et enfant.

Comment arrivons-nous à payer cette facture invraisemblable ? Nous n’y arrivons pas, bien sûr. Le gouvernement fédéral en paye 70%. Donc si vous lisez ceci d’ailleurs au Canada et que vous pensez que c’est pas votre problème, hé bin si. 936 millions de dollars. Bon, d’accord, c’est que 0.4% des dépenses du gouvernement fédéral, mais c’est quand même idiot.

Pour le reste, nous avons les impôts, et là, on en a un qui est intéressant, c’est le « GNWT payroll tax ». Je sais pas comment les français l’appellent, mais c’est une taxe de 2% sur les salaires, qui est payée par le salarié. Le site du gouvernement nous l’explique : « alors que d’autres juridictions imposent aux compagnies un impôt sur les salaires, la taxe sur les salaires des TéNOs est payable par les employés. » Alors d’abord, j’ai quand même été comptable à une époque, et j’aimerais savoir de quelle juridiction ils parlent, parce que dans la mienne il n’y avait pas d’impôt additionnel sur les salaires payé par les employeurs. Deuxièmement, de la part de tous les employés des TéNOs : merci bien, bande d’enculés. Evidemment, tous les élus sont propriétaires d’entreprises, alors ils allaient pas payer eux-mêmes, tiens… Les salauds. Et troisièmement, cet impôt spécial-TéNOs n’est pas déductible sur ta déclaration d’impôt sur le revenu, donc tu payes deux impôts sur le même revenu, ce qui est contraire au premier principe de la fiscalité canadienne, qui est que chaque revenu ne doit jamais être taxé plus d’une fois. Comme je le dis toujours, notre gouvernement, c’est que des enflures. Non seulement les élus qui ont ces idées idiotes, mais aussi les salariés qui viennent d’ailleurs pour nous saccager notre économie, qui n’était déjà pas trop bonne.

Alors une fois de plus, si tu penses venir faire ta marque chez nous, va te faire foutre, un peu. On n’a pas besoin de toi. Et puis ça te paraît pas étrange que notre gouvernement aie du embaucher quelqu’un d’ailleurs pour être la mascotte de cette campagne ridicule ? Bin c’est parce que personne de chez nous serait assez con pour te dire « viens-t-en, y a de l’argent, des possibilités d’avancement, des bons emplois, etc. » Parce qu’il n’y en a pas, et nous autres on veut pas que tu viennes icitte. D’ailleurs si tu lis le blog du gars, il a beau être payé pour te faire croire que c’est la terre du lait et du miel, il a rien a dire non plus. « A Fort Smith il y a le Parc (National de Wood Buffalo – qui est dans l’Alberta, d’ailleurs). A Fort Simpson il y a le (Parc National de) Nahanni. Il y a des gars qui travaillent pour les parcs. Ils ont été gentils avec moi. » D’accord, c’est passionnant, mais on a déjà fait une campagne de promotion du tourisme et ça aussi ça a raté, alors laisse donc un peu les parcs et leur trois employés. Je lui ai dit, « parle-nous un peu des jobs, une fois », alors il a interviewé… un des pires employeurs du territoire. C’est bien pour ça que c’est un étranger qui te fait cette campagne : parce que nous autres, on te dirait pas d’aller travailler pour des gens comme ça.

Donc, si tu veux aller faire ta marque, va-t’en donc ailleurs que chez nous.

2 commentaires:

Megan a dit…

I totally agree with your idea about creating assistant positions with the plan that those people would take over when others retire. Actually, I'd like to see a number of our public-service positions overhauled so there would be a real way to get people to progress through the system. That way, we could hire people with the right attitude and basic skills for entry-level positions, train them, and move them through the public service. This would be much more effective in the long run, and it would probably increase the number of northerners who get hired.

Right now, we have a lot of positions that require education and experience. This isn't necessarily a bad thing -- I want our public servants to know what they're doing -- but it can mean that local people who could do really well with a bit of help don't even get a foot in the door. I think we could do better.

Mongoose a dit…

What's especially annoying is that they don't apply this "people must be educated to get these jobs" philosophy evenly. When it comes to administrative work, it hardly matters whether you have education and experience, because your screw-ups only have a theoretical application anyway.

On the other hand, let's hire a company to pour the concrete for The Bridge where no one is educated in pouring concrete, and no one has experience pouring good concrete. Because The Bridge is practical work, if it fails it will be catastrophic, so who needs education and experience for that?

And while we're at it, let's sabotage trades education in the territory, because we don't need our builders to know jack... what we need is an excuse to keep the government jobs in Fort Smith going.

That's the really hateful thing about our government, other than the obtuseness and lack of logic, the real problem is that they're only motivated by their own gain, not obtaining the most good for the most people.

And it pisses me off that the people who would benefit most from electing me would not vote for me because it's all about popularity.